L’employeur est nécessairement responsable des violences ou actes de harcèlement subis par un salari
L’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.
Il manque à son obligation de sécurité de résultat lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail de violences physiques ou morales, exercées par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même l’employeur aurait pris des mesures pour faire cesser ces agissements.
Tel l’est l’enseignement de l’arrêt de la Cour de cassation du 30/10/2013 (n°12-15133).
Dans cet arrêt, M. X provoque M. Y, son collègue de travail, le poussant à bout et M. Y l’agresse physiquement. M. X est alors envoyé aux urgences, puis placé en arrêt de travail pour accident du travail pendant 75 jours. Entre-temps, M. X fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire par l’employeur de 3 jours (l’arrêt ne précise pas si M. Y a été sanctionné pour son agression physique). A la fin de son arrêt de travail, M. X indique à l’employeur qu’il prend acte de la rupture de son contrat de travail, et saisit les prud’hommes au motif que c’est lui qui a été victime de violences physiques.
La cour d’appel déboute M. X de ses demandes, estimant que M. X ne démontrait pas que l’employeur avait été informé de l’existence d’un conflit important entre lui et son collègue, ni que l’employeur l’avait sciemment laissé travailler aux côtés de son collègue le plaçant ainsi dans une situation de danger, mais qu’il était établi que l’agression ne pouvait être anticipée, qu’elle avait été soudaine et imprévisible surprenant l’ensemble des salariés présents et le superviseur, que M. X ne rapportait pas la preuve d’un manquement à l’obligation de résultat de la part de son employeur et que, par conséquent, sa prise d’acte produisait les effets d’une démission.
La Cour de cassation a cassé l’arrêt, jugeant que M. X avait été victime de violences physiques exercées sur le lieu de travail par un collègue, ce dont il résultait que l’employeur avait manqué à son obligation de sécurité de résultat.
Il ressort de cet arrêt plusieurs enseignements :
Il n’y a pas de différence à faire entre santé physique et mentale lorsqu’il s’agit de l’obligation de sécurité de résultat de l’employeur. C’est dans la logique del’article L.4121-1 du code du travail qui dispose que
L’agresseur verbal mais victime physique peut donc se plaindre d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat,
Que l’employeur ait eu connaissance du conflit latent qui aurait laissé supposer une altercation et qu’il ait pris des mesures préventives, voire qu’il n’ait eu nullement connaissance du conflit latent, le manquement de l’employeur sera caractérisé dès lors qu’il y a eu agression et l’employeur sera forcément responsable.
Cet arrêt est à rapprocher de deux précédents arrêts de la Cour de cassation du 03/02/2010 (n°08-40144 ; 08-44019).
Dans chacune de ces deux affaires, une salariée, victime d’agression et de harcèlement, avait pris acte de la rupture de son contrat de travail.
Dans la première affaire, l’employeur dès qu’il en fut informé, avait mis en œuvre des mesures conservatrices et protectrices pour la victime, l’auteur des faits n’ayant pu être sanctionné puisqu’il avait démissionné.
Dans la seconde affaire, l’employeur avait notifié un avertissement à l’auteur des faits puis l’avait muté dans un autre établissement.
Dans les deux cas, la Cour de cassation a considéré que l’employeur manque à son obligation de sécurité de résultat lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail de violences physiques ou morales, exercées par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements.
Ces positions jurisprudentielles réussiront-elles à inciter les entreprises à renforcer leur politique de prévention, et à faire que les lieux de travail deviennent des havres de paix et de bonheur ?