Inaptitude d’origine professionnelle – Consultation préalable des DP sur les possibilités de reclass
Rappels juridiques :
Art. L.1226-10 du code du travail :
« Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. »
Article L.1226-15 du code du travail :
« Lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives à la réintégration du salarié déclaré apte, prévues à l'article L. 1226-8, le tribunal saisi peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Il en va de même en cas de licenciement prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte prévues aux articles L. 1226-10 à L. 1226-12. En cas de refus de réintégration par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité ne peut être inférieure à douze mois de salaires. Elle se cumule avec l'indemnité compensatrice et, le cas échéant, l'indemnité spéciale de licenciement prévues à l'article L. 1226-14.
Lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 1226-12, il est fait application des dispositions prévues par l'article L. 1235-2 en cas d'inobservation de la procédure de licenciement. »
Ainsi, en cas d’inaptitude d’origine professionnelle :
1./ Contrairement au reclassement lié à une inaptitude non professionnelle, le reclassement consécutif à une inaptitude d’origine professionnelle implique la consultation obligatoire des délégués du personnel, après que l’inaptitude a été définitivement constatée, après que l’employeur a recherché le reclassement du salarié, avant que l’employeur ne propose au salarié un poste de reclassement approprié à ses capacités, et en cas d’impossibilité de reclassement, avant qu’il n’engage la procédure de licenciement;
2./ L’absence de consultation ou la consultation tardive des DP, ou même lorsque toutes les informations nécessaires pour le reclassement du salarié n’ont pas été transmises aux DP, donne droit aux salariés à une indemnité au moins égale à 12 mois de salaires bruts , cumulable avec les autres indemnités dues en cas de licenciement, y compris l’indemnité spéciale de l’article L.1226-14 du code du travail ;
3./ L’absence de consultation constitue un délit d’entrave aux fonctions de délégués du personnel sanctionné par une amende de 3.750 € et/ou un an d’emprisonnement.
Question : Lorsqu’une caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) est saisie par un salarié en reconnaissance d’un accident professionnel ou d’une maladie professionnelle, l’employeur doit-il néanmoins consulter les délégués du personnel, même si la CPAM ne s’est pas encore prononcée sur le caractère professionnel ?
Au vu de l’arrêt de la Cour de cassation du 25 mars 2015, il vaudrait mieux.
Dans cet arrêt, les faits étaient les suivants :
A compter du 1er juillet 2010, un salarié tombe en arrêt maladie.
A l'issue de 2 examens médicaux des 15 et 29 octobre 2010, il est déclaré inapte à son poste.
Le 22 novembre 2010, l’employeur lui propose 2 postes de type administratif correspondant aux préconisations du médecin du travail. Notons qu’à ce stade, les DP ne sont pas saisis.
Le 26 novembre 2010, le salarié les refuse tous les 2.
Le 7 décembre 2010, la CPAM notifie au salarié et à l'employeur sa décision de prise en charge de la pathologie du salarié à l'origine de son inaptitude au titre d'une maladie professionnelle.
Le 17 décembre 2010, l’employeur convoque les DP pour recueillir leur avis sur les recherches de reclassement.
En janvier 2011, le salarié est licencié.
Le salarié saisit la juridiction prud'homale de demandes de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement et au titre d'un licenciement abusif, faisant valoir que les DP n’avaient pas été consultés avant que les deux postes ne lui fussent proposés.
Pour l’employeur, aucun élément objectif versé au débat ne démontre que la société a eu connaissance du caractère professionnel avant le 7 décembre 2010 et en tout cas avant le 22 novembre 2010, et la société, en convoquant les DP le 17 décembre 2010 pour recueillir leur avis sur les recherches de reclassement du salarié, a donc non seulement respecté son obligation légale de reclassement (laquelle ne constitue pas une obligation de résultat), mais aussi la formalité substantielle de consultation des DP.
Mais la Cour de cassation donne raison au salarié :
« Il appartenait à l'employeur, dès lors qu'il avait connaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude, de respecter l'obligation légale de consultation des délégués du personnel antérieurement aux éventuelles propositions de reclassement. Il ressortait (…) que les délégués du personnel avaient été consultés postérieurement aux offres de reclassement du salarié. »
En conclusion : en attendant la notification de la décision de la CPAM de prise en charge, l’employeur a tardé à consulter les DP, consultation qui a donc été faite postérieurement aux propositions de reclassement. Or le défaut de consultation des DP antérieurement, ne peut être régularisé par une consultation postérieure à la présentation des offres de reclassement.
L’employeur doit donc faire attention à la procédure, même s’il a eu connaissance d’une simple demande de reconnaissance de maladie ou d’accident professionnel.