Pression de l’employeur sur un délégué syndical : cas de discrimination syndicale (Cass. crim. 19 no
Rappel des principes :
Art. L.2141-7 du code du travail : « Il est interdit à l'employeur ou à ses représentants d'employer un moyen quelconque de pression en faveur ou à l'encontre d'une organisation syndicale. »
Art. 2141-8 du code du travail : « Les dispositions des articles L. 2141-5 à L. 2141-7 sont d'ordre public. Toute mesure prise par l'employeur contrairement à ces dispositions est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts. »
Art. L.2146-2 du code du travail : « Le fait pour l'employeur de méconnaître les dispositions des articles L. 2141-5 à L. 2141-8, relatives à la discrimination syndicale, est puni d'une amende de 3.750€. La récidive est punie d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 7.500€. »
L’affaire pénale du 19 novembre 2013 (Cass. crim. n°12-82163) :
Dans cette affaire, un employeur avait, en 2008, signé et adressé trois lettres « ouvertes » à l'ensemble des salariés de l'entreprise. Dans l’une, il reprochait à un délégué syndical sa position adoptée dans le cadre des négociations sur l'intéressement au sein de l'entreprise qui, selon cet employeur, n'était ni réaliste, ni acceptable et qui allait conduire à l'échec des négociations. Dans une autre rédigée après la clôture et l'échec des négociations, il mettait en cause le délégué syndical. Dans une troisième, il remerciait "les délégués libres" et les mettait en opposition face au délégué syndical qu’il disait fermé à toute négociation.
Selon l’employeur, ces lettres ouvertes :
ne faisaient qu’informer les salariés de l'entreprise du déroulement des négociations en cours avec les organisations syndicales relatives au versement à leur bénéfice d'une prime d'intéressement en faisant état de faits objectifs, et qu’exprimer l'opinion, la surprise et l’incompréhension du dirigeant face à l'échec des négociations, puis son soulagement à la suite de la conclusion de l'accord d'intéressement par le comité d'entreprise,
et ne portaient pas atteinte à la liberté syndicale.
Mais pour la Cour d’appel et Cour de cassation, en faisant porter sur le délégué syndical l’échec des négociations et en jetant sur lui le discrédit dans un contexte de négociation difficile, ces lettres :
manquaient de prudence dans leur expression,
stigmatisaient le délégué syndical, et caractérisaient sa position et son manque d'objectivité,
constituaient un moyen de pression à l'encontre du délégué syndical, caractérisant ainsi une discrimination syndicale.