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FORFAIT-JOURS ET OBLIGATION DE SECURITE

SUR L'OBLIGATION DE SECURITE


L’employeur, tenu d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité ;


En vertu de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ;


Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ;


Il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances ;


En vertu de l'article L. 4121-2 du code du travail, l'employeur met en œuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention en particulier, éviter les risques, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme et planifier la prévention ;


En vertu de l'article L. 4121-3 du code du travail, l'employeur, compte tenu de la nature des activités, évalue les risques pour la santé et la sécurité, y compris notamment dans la définition des postes de travail et, à la suite de cette évaluation, met en œuvre les actions de prévention ;


Il en résulte que, dans le cadre de l'obligation de prévention, il appartient à l'employeur d'identifier les risques pour la santé et la sécurité induits par l'organisation du travail ;


Il appartient à l'employeur, sur qui pèse l'obligation de sécurité, d'en assurer l'effectivité ;


Il en résulte qu'il appartient à celui-ci, lorsque l'existence de risques est sérieusement alléguée, d'établir qu'il a rempli son obligation de prévention des risques ;



SUR LE FORFAIT-JOURS ANNUEL


Les risques psycho-sociaux sont de nature à compromettre la santé (physique et mentale) et la sécurité des salariés.


Selon l’INRS, il existe 6 catégories de facteurs de risques psychosociaux au travail.


La première est : « Intensité et temps de travail ».


Selon l’INRS, « cette première catégorie comprend les notions d’« exigences psychologiques » et « d’efforts » mais plus largement les contraintes de rythme, l’existence d’objectifs irréalistes ou flous, l’exigence de polyvalence non maîtrisée, les instructions contradictoires, les longues journées de travail, le travail en horaires atypiques, l’imprévisibilité des horaires de travail… ».


(http://www.inrs.fr/risques/psychosociaux/facteurs-risques.html)


La charge de travail constitue un facteur de risque psycho-social.


Il appartient à l'employeur de prendre les mesures de prévention nécessaires, et en premier lieu celles relatives à l'identification des risques résultant de son organisation du travail, afin de les éviter ou de les supprimer.


L’intensité au travail est donc un facteur de risques, et les salariés soumis à un forfait en jours sont d’autant plus soumis à ce facteur que ce forfait-jours est imposé sans limites, ni contrôles.


On rappelle également que l’état de stress survient s’il y a déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face (cf. ANI du 02/07/2008).



a/ Rappel de règles de droit sur le forfait jours annuel :


Les articles L. 3121-56 et L. 3121-58 du Code du travail relatives aux conventions de forfait sur l'année ne sont pas applicables aux salariés appartenant au personnel roulant des entreprises de transport routier (C. transp., art. L. 3313-2).


Les modifications apportées au forfait en jours sont les suivantes :

  • — mise en place d'un droit à la déconnexion, applicable depuis le 1er janvier 2017 ;

  • — obligation faite à l'employeur de s'assurer « régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable » ;

  • — encadrement de la renonciation par le salarié à ses jours de repos.



Selon la loi actuelle en vigueur :


« Peuvent conclure une convention individuelle de forfait en jours sur l'année, dans la limite du nombre de jours fixé en application du 3° du I de l'article L.3121-64 :

1° Les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés ;

2° Les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées. »


(art. L.3121-58 nouveau du code du travail – loi n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V))


Il reste que les cours d’appel et la Cour de cassation ont posé des cadres et limites aux forfaits annuels en jours pour lutter contre les abus des employeurs, et les atteintes à la santé et sécurité :


  • D’abord, le juge contrôle que le critère d’autonomie est bien rempli :


Si tel n’est pas le cas, le forfait jours est déclaré inopposable au salarié, qui peut obtenir le paiement d’heures supplémentaires :


(Cass. soc. 21/03/2012 n°10-20237)


  • C’est ce qui a été jugé à propos de cadres employés par un casino, qui, bien qu’ayant signé des conventions de forfait jours, étaient soumis à des horaires prédéterminés dépendant d’un planning collectif mensuel daté et signé par la direction. Toute possibilité de quitter le travail avant l’horaire prévu était proscrite :

  • La Cour de Cassation a estimé que compte tenu de l’absence de liberté dans la fixation d’emploi du temps, les conventions de forfait jour ne pouvaient être opposées aux intéressés.


(Cass. soc. 15/12/16 n°15-17568 ; Cass. soc. 23/01/13 n°11-12323)


  • La même solution a été retenue s’agissant d’un salarié dont l’emploi du temps était déterminé par son supérieur hiérarchique, lequel définissait le planning de ces interventions auprès de ses clients.


(Cass. soc. 31/10/12 n°11-20986)


  • Même solution, s’agissant d’un salarié dont l’emploi du temps était déterminé par la direction et qui ne disposait pas du libre choix de ses repos hebdomadaires, ce dont il se déduisait que l’intéressé ne disposait d’aucune liberté dans l’organisation de son travail.


(Cass. soc. 31/10/07 n°06-43876)


  • Ensuite, le juge contrôle que le salarié appartient à l’une des catégories définies par l’accord et pouvant être soumises au forfait jours :


Car, pour savoir si un salarié est éligible au forfait jours, il faut consulter l’accord collectif applicable.

La loi renvoie en effet à l’accord d’entreprise ou d’établissement, à défaut à la CCN ou accord de branche, le soin de déterminer les catégories de salariés susceptibles d’être soumis au régime du forfait jours.


(Art. L.3121-64 nouveau du code du travail)


Un salarié, qui n’entre pas dans une de ces catégories, ne saurait être soumis au forfait jours, et ce quand bien même il disposerait d’une autonomie dans l’organisation de son emploi du temps.


(Cass. soc. 03/11/11 n°10-14637)


Lorsque l’accord collectif réserve le forfait jours aux salariés qui bénéficient d’une classification minimale, le forfait jours d’un salarié qui ne remplit pas cette condition n’est pas valable.

Il en est de même si l’accord prévoit une condition d’autonomie à la fois dans la fixation de l’horaire de travail et dans le mode d’organisation du travail et que celle-ci fait défaut.


(Cass. soc. 03/11/11 n°10-14637 ; Cass. soc. 21/11/12 n°11-10829)



  • Ensuite, le juge contrôle que l’accord collectif ou la convention individuelle présente des garanties suffisantes pour assurer le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du salarié :


Car à propos des forfaits en jours sur l’année, la loi et la Cour de cassation ont fixé les règles :


  1. Le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles,

  2. Le forfait en jours ne peut être mis en place que si un accord collectif ou de branche le prévoit ;

  3. Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires,

  4. L’accord collectif ne peut se contenter de renvoyer à la convention individuelle de forfait, le soin de fixer les modalités de mise en œuvre et de contrôle du nombre de jours travaillés, ni constituer une simple déclaration de principe, se limitant simplement à faire référence au respect du repos quotidien et hebdomadaire ainsi que des durées maximales de travail ;

  5. Un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours doit percevoir une rémunération en rapport avec les sujétions qui lui sont imposées (art. L.3121-61 du code du travail).

  6. L’accord collectif doit déterminer (art. L.3121-64 CT) la durée annuelle du travail, i.e. le nombre de jours maximal pouvant être travaillés sur l’année ;

  7. Les dispositions conventionnelles doivent assurer « la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires », et de manière plus large « le respect du droit à la santé et au repos », ainsi qu’une « amplitude et une charge de travail raisonnables », « une bonne répartition du travail dans le temps ».

Lorsque les conventions ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés, et donc à assurer la protection de la sécurité et de la santé des salariés, les conventions de forfait en jours sont nulles ;


Dans un forfait-jours, la charge de travail du salarié doit faire l’objet d’un suivi régulier sur l’année, et dès lors que la convention individuelle est nulle, le salarié est en droit de réclamer les heures supplémentaires ;


(Cass. soc. 19/09/12 n°11-19016 ; Cass. soc. 31/01/12 n°10-19807

Cass. soc. 29/06/11 n°09-71107 ; Cass. soc. 31/01/2012 n°10-19807

Cass. soc. 29/06/2011 n°09-71107 ; Cass. soc. 26/09/2012 n°11-14540

Cass. soc. 24/04/2013 n°11-28398 ; Cass. soc. 11/06/2014 n°11-20985

Cass. soc. 14/12/2016 n°15-22003 ; Cass. soc. 09/11/2016 n°15-15064)

(Cass. soc. 08/11/2017 n°15-22758)


Et la Cour de cassation rappelle aux juridictions du fond qu’il leur appartient :


  • de constater l’existence d’un accord d’entreprise ou d’établissement organisant les modalités de mise en place d’une convention de forfait en jours,


  • de vérifier que les stipulations des accords de branche ou d’entreprise sont de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait en jours,

- car « toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires. »


(Cass. soc. 06/07/2016 n°15-12199 ; Cass. soc. 22/06/2016 n°14-15171 ;

Cass. soc. 02/07/2014 n°13-11940 ; Cass. soc. 30/04/2014 n°13-11034)


  • de vérifier que ces stipulations ont été observées par l’employeur, sans se contenter de vérifier s’il y a eu une feuille de route mensuelle gérant le temps de travail,


- car la charge de travail du salarié doit faire l’objet d’un suivi régulier sur l’année, l’organisation annuelle ou biannuelle du travail en forfait-jours doit nécessairement être accompagnée de mécanismes de suivi régulier, sur toute l’année, de la charge de travail ;


- car depuis 2011, la Cour de Cassation exige que les accords collectifs comportent des dispositions qui assurent la garantie du respect des durées maximales de travail, ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires, une amplitude et une charge de travail raisonnable, ainsi qu’une bonne répartition du travail dans le temps ;


(Cass. soc. 29/06/2011 n°09-71107 ; Cass. soc. 26/09/2012 n°11-14540)


- car l’accord collectif doit garantir le respect du droit à la santé et au repos des salariés. Dans cet objectif, les dispositions conventionnelles doivent prévoir des mécanismes de contrôle et de suivi régulier de l’amplitude et de la charge de travail ;


(Cass. soc. 14/05/2014 n°12-35033 + n°13-10637)


  • lorsque ces mécanismes sont insuffisants pour garantir la santé et la sécurité des salariés en forfait-jours, toute convention individuelle conclue sur cette base est nulle et permet aux salariés de demander le paiement des heures supplémentaires effectuées ;


(Cass. soc. 14/12/2016 n°15-22003 ; Cass. soc. 25/01/2017 n°15-21950 ;

Cass. soc. 26/04/2017 n°15-15671)


- car comme le précise la Cour de Cassation, l’accord collectif ne peut déléguer au seul salarié l’entière responsabilité de veiller à organiser et à répartir sa charge de travail dans les limites fixées par les partenaires sociaux.


Le suivi individuel, c’est l’affaire de l’employeur, le salarié ne peut être laissé seul face à la gestion de l’amplitude de ses journées et de la charge de travail qui en résulte ;


(Cass. soc. 11/06/2014 n°11-20985 ; Cass. soc. 05/10/2017 n°16-23106)


- car comme l’a jugé la Cour de cassation, dès lors que les règles relatives au repos dont doivent bénéficier les salariés n'ont pas été respectées pendant l'exécution de la convention de forfait en jours, que l'employeur n'a pas organisé d'entretien portant sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise et l'articulation entre la vie professionnelle et personnelle, que l'employeur n'établit pas avoir pris de mesures effectives pour remédier à la surcharge de travail, que le non-respect par l'employeur des clauses de l'accord collectif destinées à assurer la protection de la sécurité et de la santé des salariés soumis au régime du forfait en jours prive d'effet la convention de forfait, le salarié peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires ;


(Cass. soc. 25/01/2017 n°15-21950)


- car l’employeur doit respecter les exigences conventionnelles et réagir efficacement en cas de surcharge de travail, étant rappelé qu’en vertu de l’article L.3121-60 du code du travail :


« L'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail. »


- car, comme le rappelle la Cour de cassation, l’accord instituant le forfait-jours doit permettre de remédier en temps utile à une charge de travail incompatible avec une durée raisonnable de travail. Les modalités conventionnelles de suivi de l’amplitude et de la charge de travail des salariés en forfait-jours doivent permettre à l’employeur de réagir en temps utile si une anomalie est constatée ;


(Cass. soc. 05/10/2017 n°16-23106 ; Cass. soc. 08/11/2017 n°15-22758)


A tel point que selon la Cour de cassation :


« Mais attendu qu’ayant relevé que l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat, imposait à la salariée, en dépit de ses multiples plaintes, des horaires de travail importants ne lui permettant plus de disposer du repos légal hebdomadaire et de nature à compromettre sa santé, la cour d’appel en a justement déduit que de tels manquements étaient d’une gravité suffisante pour justifier la prise d’acte de la rupture du contrat à ses torts par la salariée » ;


(Cass. soc. 28/05/2013 n°12-12862)

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